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16 février 2019 6 16 /02 /février /2019 09:05
Luc Bossus "Ordonner prêtres des gens mariés" Réponse de Luc Bossus à Charles Delhez - Bruxelles le 7 février 2019
Luc Bossus

Monsieur l’abbé,

Dernièrement, j’ai pris connaissance de votre lettre adressée au pape. Elle m’a fort interpellé.

Durant toute ma vie, j’ai été et suis encore en questionnement, en recherche dans le domaine religieux. Je m’informe et réfléchis beaucoup, seul ou avec d’autres personnes, sur la vie et le message de Jésus de Nazareth, l’Evangile, « Dieu » et l’Eglise catholique (son passé, son présent et son avenir…).

C’est dire que votre lettre a retenu toute mon attention.

Suite à sa lecture, je voudrais vous faire part de mon point de vue par rapport au sujet exprimé : « Saint-Père, il y a urgence à ordonner prêtres des gens mariés. »

Je souhaite d’emblée vous préciser qu’il ne s’agit que de mon humble avis, que je ne veux entraîner personne dans le sillage de ma pensée, que je ne fais pas de prosélytisme.

Afin que vous puissiez découvrir et bien comprendre ce que je pense à ce sujet, je vous invite, si vous le voulez bien, à suivre les étapes suivantes :

1) Lire la série d’articles (il y en a 7) rédigés par Jacques MUSSET sur le thème « Eloge de la prise de risque en christianisme » parus sur le blog de LPC

2) J’ai été fort interpellé par l’article n° 5 « Le refus de prendre les risques qui s’imposent : maladie chronique de l’Eglise catholique romaine » que j’ai retranscrit dans un tableau afin de pouvoir mieux comprendre les deux options décrites. Je vous invite à en prendre connaissance.

Note : Sachez que j’apprécie beaucoup les écrits de Jacques MUSSET. Je suis en communion profonde avec ses analyses qu’il décrit si bien. Je l’apprécie aussi beaucoup en tant que personne. Dans le cadre de LPC, j’ai eu l’occasion de le rencontrer. Quel bonheur pour moi ! Quel homme simple vivant une intériorité si profonde !

Ce n’est donc qu’après ces deux premières étapes que je vous invite, Monsieur l’abbé, à lire mon point de vue décrit ci-après. Merci !

Je ne vous connais pas personnellement, vous êtes certainement très gentil et avez le souci de bien faire en voulant faire progresser l’Eglise-Institution catholique, mais permettez-moi de vous dire (et je sais néanmoins que je ne suis vraiment pas le seul à penser ainsi !), avec tout le respect que j’ai pour vous, qu’il s’agit d’un combat d’arrière-garde. L’enjeu est ailleurs et est beaucoup plus important que cela ! Aujourd’hui, il ne s’agit pas de mettre des sparadraps sur le corps de l’Eglise-Institution catholique gravement malade (elle me fait penser à une personne en phase terminale d’un cancer) ! Il s’agit d’effectuer une révolution copernicienne afin qu’elle devienne crédible pour les êtres humains d’aujourd’hui et de demain. Je pense au plus profond de moi-même qu’actuellement, « le christianisme n’existe pas encore » !

Il est donc évident pour moi qu’il faut d’urgence appliquer l’option n° 1 décrite par Jacques MUSSET : Il faut prendre le risque d’actualiser le témoignage de Jésus, ceci en opposition à l’entretien routinier d’un système religieux si bien appliqué par le catholicisme institutionnel ! « Le témoignage de Jésus est à actualiser en permanence (…) ! » nous dit-il. Et c’est tellement vrai !

J’en viens maintenant au message contenu dans la lettre que vous adressez au pape, c’est-à-dire « l’urgence à ordonner prêtres des gens mariés ».

Il me semble qu’aujourd’hui, l’urgence est de revenir aux sources, c’est-à-dire à la vie et au message de Jésus de Nazareth (voir l’article 7 de Jacques MUSSET : « La prise de risque des chrétiens de base dans la crise actuelle de l’Eglise romaine »).

Quand on sait que Jésus n’a jamais voulu fonder une Eglise, tout est à remettre en question… ! Ici, je ne donne mon avis qu’à propos de l’eucharistie.

Le statut de prêtre, défini par l’Eglise-Institution catholique, précise que seuls les prêtres peuvent célébrer l’eucharistie. Ce statut, lié à la Tradition et au dogme de la transsubstantiation, est-il en phase avec ce qu’a vécu et prôné Jésus de Nazareth ? Personnellement (et, pour ceci aussi, je ne suis vraiment pas le seul à le penser !), je ne le crois pas ! Au moment du dernier repas, après avoir partagé le pain et le vin avec ses amis, Jésus dit : « Vous ferez cela en mémoire de moi. » Il a bien dit « en mémoire », c’est-à-dire « en souvenir » de lui. Quand Jésus dit « Ceci est mon corps (…), ceci est mon sang (…) », il parle bien de sa vie entière donnée par amour aux autres, et non pas de sa chair corporelle ! J’en déduis donc que Jésus n’a jamais pensé un seul instant à la « transsubstantiation », mais simplement au pain et au vin, nourriture et boisson, comme symboles de partage de sa vie. Voilà ce qu’est l’eucharistie pour moi.

Et pour ce faire, un prêtre n’est absolument pas nécessaire ! Jésus a dit lui-même : « Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux. » (Mt 18, 20)

Selon moi (et je ne suis, une fois de plus, vraiment pas le seul à penser ainsi !), ceux qui sont aujourd’hui les disciples de Jésus (prêtres ou laïcs, hommes et femmes), en petits ou en plus grands groupes, après avoir lu un extrait de l’Evangile, y avoir réfléchi et avoir discuté ensemble de l’interprétation actualisée du texte, pourraient simplement partager du pain et du vin mis à table pour pouvoir faire ensemble mémoire de ce qu’a fait Jésus de Nazareth au moment de son dernier repas avec les siens.

J’ai vécu personnellement cette forme d’eucharistie à plusieurs reprises, en petit groupe, avec des amis de LPC. Chaque membre de cette équipe a vécu ces moments d’une forte intensité intérieure avec énormément de joie et dans une communion profonde avec Jésus de Nazareth. C’était du vrai, du sincère, du vécu !

Il ne faut pas avoir reçu des « pouvoirs » ou une « autorisation » quelconque pour pouvoir partager la vie, celle de Jésus !

Ceci est ma conviction profonde.

J’imagine que l’avenir de l’Eglise catholique pourrait se vivre ainsi, avec des petites communautés vivantes animées par des laïcs (hommes et femmes).

« On ne peut donner rendez-vous au vent, mais on peut laisser la fenêtre ouverte .»

Voilà, Monsieur l’abbé, ce que je voulais partager avec vous aujourd’hui.

Je vous remercie beaucoup de m’avoir lu et vous souhaite une bonne continuation dans vos activités.

En vous souhaitant une agréable journée, je vous prie de recevoir, Monsieur l’abbé, mes meilleures salutations.

Luc Bossus

Published by Libre pensée chrétienne