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21 janvier 2023 6 21 /01 /janvier /2023 09:00

 

bateau lpc Lettre aux évêques de France
Par Collectif Pour un christianisme d'avenir
Robert Ageneau, Serge Couderc, Paul Fleuret,
Jacques Musset, Philippe Perrin, Marlène Tuininga
pourunchristianismedavenir@gmail.com
Le 28 juin 2022

Messieurs les évêques de France,

La France vient de vivre une période électorale pour choisir le président de la République puis les députés. Les résultats sont effarants :

- l'abstention a atteint des records : près de 30 % d'abstention aux deux tours des présidentielles. Et plus de 50 % pour chacun des deux tours des législatives.

- l'extrême droite fait une entrée en force à l'Assemblée nationale avec 89 députés.

Comme à chaque élection nationale, le Conseil Permanent des évêques de France a fait plusieurs déclarations :

- le 18 janvier, le texte intitulé L'espérance ne déçoit pas. Ce texte veut proposer des « repères de discernement sur la vie sociale et politique ».

- le 13 avril, à l'occasion du 2ème tour de la présidentielle paraît une nouvelle déclaration. Elle renvoie les lecteurs au texte de janvier et ajoute un appel « à l'intelligence, à la conscience et à la liberté de chacun ». Les évêques du Conseil Permanent « rappellent aux catholiques l'importance de voter et de le faire en conscience ».

- le 3 mai, en vue des législatives, nouvelle déclaration épiscopale. Renvoi est fait à nouveau au texte de janvier. L'ensemble du texte n'apporte rien de neuf.

Ces trois déclarations sont tout à fait indigentes ; elles expriment des avis très généraux, sans pointer les grands dangers que représentent l’extrême droite, à la différence des déclarations de la Fédération protestante de France qui, sur ce sujet comme sur les autres, s’est engagée avec des constats et des propositions argumentées.

Lors d'élections précédentes, on a connu les évêques – ou des évêques – autrement plus hardis et plus clairs dans leurs déclarations. Ainsi en 2002 :

- Albert Decourtray, cardinal : les thèses du Front national sont « incompatibles avec la Bonne Nouvelle et l’enseignement de l’Église ».

- Claude Dagens, évêque d’Angoulême : « Il faut résister à la peur, à la haine et au mépris ».

- Jacques David, évêque d’Évreux : « Notre foi nous dit que l’avenir est à la fraternité entre tous les peuples, en commençant par l’Europe ».

- Olivier de Berranger, évêque de Saint-Denis (accusé, quelques jours plus tôt sur TF1, par le candidat Jean-Marie Le Pen de « voter communiste ») : « Cela confirme mon impression générale que ce n’est pas seulement dans le domaine politique mais dans beaucoup d’autres que ce candidat n’hésite pas à avoir recours au mensonge, à la calomnie. C’est une signature. J’espère que cette signature éclairera les chrétiens et les personnes sensées de ce pays ».

- François Garnier, archevêque de Cambrai : « L'extrême droite répond mal, très mal, aux bonnes questions parce qu'elle utilise, à des fins égoïstes, la "peur originelle de l'autre" qui peut toujours habiter en chacun, chacune d'entre nous… Le rétablissement de la peine de mort serait une honte… La remise en cause de la construction commencée de l'Europe serait un terrible recul ».

- En 2017, Denis Moutel, évêque de Saint-Brieuc, a tweeté : « Non à Mme Le Pen », ce qui lui a valu des tombereaux d'insultes sur les réseaux sociaux.

Or, en 2002 comme en 2017, la situation n'était pas aussi grave que cette année : l'extrême droite n'avait aucune chance d'accéder au pouvoir. En 2021 et en 2022, on a vu et entendu un nouveau tribun extrémiste en la personne d’Éric Zemmour dont les propos manifestaient le racisme le plus éhonté, le rejet des étrangers surtout s'ils sont d'origine africaine ou maghrébine.

Nulle voix d'évêque ne s'est fait entendre pour crier : Stop ! Nulle déclaration du Conseil permanent des évêques quand Marine Le Pen ou le même Éric Zemmour prônaient le repli sur soi de la France, instillaient la peur de "la submersion migratoire", de "l'islamisation et du grand remplacement" et envisageaient des formes de retrait de l'Union Européenne.

Pourquoi ce silence épiscopal ? Il est dû, nous n'en doutons pas, à la peur de faire éclater au grand jour les différences, voire les scissions, qui existent dans le corps épiscopal : certains évêques ne seraient-ils pas proches du Rassemblement National ? On peut penser aussi que les évêques ne veulent pas déplaire aux catholiques qui fréquentent les églises et votent pour l’extrême droite sans complexe. Une autre peur est liée à la mise au jour de l'ampleur insoupçonnée de la pédophilie dans l'Église catholique, ampleur qui paralyse et décrédibilise la parole épiscopale.

Alors, force est de constater le repli sur soi qui s'opère : les bulletins paroissiaux et diocésains se remplissent d'annonces de réunions de prière, de temps d'adoration et de piété mariale, de pèlerinages dans tous les sanctuaires jusque-là en perte de vitesse. Les communautés dites nouvelles et des instituts de prêtres ensoutanés, appelées officiellement par des évêques, s'immiscent dans les diocèses et les paroisses et mettent en place une pastorale et une théologie réactionnaires.

Nous n'avons pas besoin que les évêques nous disent pour quoi et pour qui voter. Mais nous n'oublions pas que des pouvoirs totalitaires sont arrivés au pouvoir par la voix des urnes. Alors, nous attendons des évêques des prises de position fortes et claires pour signaler le danger de l'extrême droite dont les valeurs sont à l'opposé de l'Évangile où Jésus le Christ prêche l'égale dignité de tous les hommes et de toutes les femmes.

Collectif Pour un christianisme d'avenir
Robert Ageneau, Serge Couderc, Paul Fleuret,
Jacques Musset, Philippe Perrin, Marlène Tuininga
pourunchristianismedavenir@gmail.com

Published by Libre pensée chrétienne