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18 novembre 2023 6 18 /11 /novembre /2023 09:00

 

bateau lpc Essai de reconstitution de
«L'invention du christianisme»
par les «Hellénistes» dissidents de la
« Synagogue des affranchis »
extrait du livre du pasteur Roger Parmentier
Un coup de maître: Saül devient chrétien

Mais le coup de maître des Hellénistes « chrétiens » ce sera la conversion à leur kérygme de leur pire adversaire, Saül de Tarse, le futur apôtre Paul.

Il s'agit vraisemblablement d'une conversion exégétique, d'une interprétation fabuleuse du verset que Paul citera avec délectation en Galates 3.13: jusqu'alors Saul de Tarse avait cru que Jésus avait été châtié par Dieu pour son impiété, son imposture, son appel à la magie pour réaliser de pseudo-miracles et sa possession par des démons.

Mais soudain son esprit est illuminé : toujours par le « pour nous » le « pro nobis » Christ (et non pas Jésus) a payé pour nous libérer de la malédiction de la Loi, en devenant lui-même malédiction pour nous, puisqu'il est écrit: « Maudit quiconque est pendu au bois … Cela pour que la bénédiction d'Abraham parvienne aux païens ...» (Gal. 3. 13-14). Ce « pour nous » change tout et l'on peut comprendre que Saül en ait été bouleversé et ait été converti.

Ainsi ébloui, il va se rendre chez les chrétiens, les Hellénistes qui s'étaient écartés de Jérusalem jusqu'à Damas, et qu'il voulait persécuter. Mais c'est lui cette fois qui tombes entre leurs mains :ils le soignent, le nourrissent, l’endoctrinent, le baptisent, en font un des leurs, un « adepte de la voie » du Seigneur (Act 9.) rempli d'Esprit saint (ce qui signifie dans le langage des Actes ‘enthousiasmé par le kérygme’), au point de le proclamer irrésistiblement: « Il proclamait dans les synagogues que Jésus est le fils de Dieu » (9.20) …« Et il confondait les habitants juifs de Damas en prouvant: que Jésus est bien le Messie » (9.22). Une recrue merveilleuse pour les militants du kérygme ...

« Arrivé à Jérusalem, Saül essayait de s'agréger aux disciples ; mais tous avaient peur de lui, n'arrivant pas à le croire vraiment disciple. Barnabé le prit avec lui, l'introduisit auprès des apôtres et leur raconta comment, sur la route, il avait vu le Seigneur qui lui avait parlé ... Dès lors, Saül allait et venait avec eux dans Jérusalem, s'exprimant avec assurance au nom du Seigneur. Il s'entretenait avec les Hellénistes (ceux qui n'étaient pas devenus chrétiens, mais au contraire s'opposaient au kérygme et sa proclamation publique) et discutait avec eux ; mais eux cherchaient à le faire périr ».(9.26-29).

Les hellénistes fabriquent les «évangiles »

Nouvel adepte du kérygme incendiaire et mythologique, le futur apôtre Paul va en donner plusieurs formules ; et surtout, va le développer, l'illustrer, en tirer de plus en plus en conséquence : Ce sont ces célèbres épîtres qui vont circuler dans les « églises » et vont constituer le noyau du Nouveau Testament.

« Je vous rappelle, frères, l'Évangile que je vous ai annoncé, que vous avez reçu, auquel vous restez attaché et par lequel vous serez sauvés si vous le retenez tel que je vous l'ai annoncé ; autrement vous auriez cru en vain. Je vous ai transmis en premier lieu ce que j'avais reçu moi-même : Christ est mort pour nos péchés, selon les Ecritures. Il a été enseveli, il est ressuscité le troisième jour, selon les Ecritures. Il est apparu à Céphas, puis aux Douze. ».( 1 Co.15.l-5).

Que dire de plus ? « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous? Lui qui n'a pas épargné son propre Fils , mais qui l'a livré pour nous tous, comment, avec son Fils, ne nous donnera-t-il pas tout ? Qui accusera les élus de Dieu ? Dieu justifie ! Qui condamnera? Jésus-Christ est mort, bien plus il est ressuscité, lui qui est à la droite de Dieu et qui intercède pour nous. ». (Rom. 8. 31-34) ...

« Ou bien ignorez-vous que nous tous, baptisés en Jésus Christ, c'est en sa mort que nous avons été baptisés ? Par le baptême en sa mort, nous avons donc été ensevelis avec lui afin que, comme Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous menions aussi une vie nouvelle. Car si nous avons été totalement unis, assimilés à sa mort, nous le serons aussi à sa Résurrection »... (Rm. 6..3-5).

« Son énergie, sa force toute puissante, il les a mises en œuvre dans le Christ, lorsqu'il l'a ressuscité des morts et fait asseoir à sa droite dans les cieux, bien au-dessus de toute Autorité, Pouvoir, Puissance, Souveraineté et de tout autre nom qui puisse être nommé, non seulement dans ce monde, mais encore dans le monde à venir. Oui, il a tout mis sous ses pieds et il l'a donné, au sommet de tout, pour tête à l'Eglise qui est son corps, la plénitude de Celui que Dieu remplit lui­ même totalement. »(Eph. 1. 20-23)...

On est à des années-lumière de la proposition de Jésus, remplacée par des constructions surnaturelles de plus en plus stupéfiantes. Pauvre Jésus!

Bien plus tard on va se mettre à rédiger des « évangiles », des « vies de Jésus » qui n'ont plus grand-chose à voir avec l'Histoire de Jésus de Nazareth et son destin tragique de sage-prophète, malmené et éliminé pour avoir voulu mettre à bas tout ce qui fait souffrir et mourir notre humanité. Car le Jésus des Evangiles n'est plus Jésus, mais « Jésus-Christ » ...

Ces évangiles vont se caractériser par leur caractère de plus en plus mythologique (dans le prolongement des constructions fabuleuses de Paul), par la divinisation totale du «Christ» (ou de Christ), par le recours constant aux miracles et au surnaturel, par leur justification fondamentale du kérygme initial, par l'utilisation systématique de l'interprétation christologique de l'Ancien Testament, par l'anti-judaïsme théologique constant (rien à voir avec l'antisémitisme racial), par la justification des institutions ecclésiales, leurs ministères et leurs sacrements... Il s'agit, dans les quatre évangiles, de promouvoir et de célébrer en les légitimant par une pseudo-histoire, les convictions et les traditions des premières générations chrétiennes. Une catastrophe.

Retrouver «Jésus» ? Un recueil retrouvé

Mais, vers les années 50 ou 60, se produit un évènement infiniment précieux, on pourrait dire miraculeux s'il était encore possible de croire aux miracles: la constitution d'un recueil (écrit ou oral) rassemblant les souvenirs fragiles des anciens auditeurs et disciples du rabbi-prophète Jésus de Nazareth. Recueil qu'on appellera plus tard « la Source » (des Paroles de Jésus). On n'a pas fini de mesurer l'importance décisive de ce recueil sans lequel nous serions complètement livrés aux constructions mythologiques des inventeurs du kérygme. Mais ce recueil a été constitué; et de nos jours il a été identifié et reconstitué. Il s’agit tout simplement des versets qui sont identiques dans les évangiles de Matthieu et de Luc. (Voir les ouvrages de Frédéric Amsler et Jean-Marc Babut)

Un deuxième évènement prodigieux a surgi, un autre véritable «miracle»: rédigeant chacun leur évangile mythologique, les auteurs des évangiles selon Matthieu et selon Luc ont eu l’idée géniale d’y intégrer, chacun à sa manière, le fameux recueil « la Source des Paroles de Jésus » Il faut croire que ce recueil, rédigé sans doute en opposition aux constructions des hellénistes prépauliniens et de Paul, avait acquis une notoriété et une légitimité considérables, au point d'être devenu incontournable. Et effectivement, il n'a pas été contourné, mais au contraire intégré, différemment chez Matthieu et Luc. Ces deux évangiles constituent donc un étrange mélange, où il est devenu indispensable de savoir trier et discerner le bon grain de la paille. Mais les pailles ont aussi une certaine utilité.

Nous n'avons pas fini de mesurer la valeur de « La Source » pour découvrir le message central de Jésus, sa proposition grandiose d’inventer et de réaliser un monde absolument opposé au fonctionnement du monde actuel. C’était dans son langage très daté, « l’entrée dans le Règne de Dieu ».

Mais la formule originelle « le règne de Dieu est proche » a donné lieu à de nombreuses fausses interprétations: croire qu'il s'agissait du rétablissement de l'authentique monarchie d'Israël, croire qu'il s'agissait d'un règne qui serait établi dans l'avenir, soit lors de notre décès, soit lors du jugement dernier. Alors qu'il s’agissait simplement, mais pas sans effort, de changer radicalement de mentalité et de comportement, de venir au secours de tous, même de nos ennemis et de préférer l’authenticité à toutes les hypocrisies religieuses. C'est l'entrée dans la «Basileia tou Théou », l'entrée dans le règne de Dieu immédiatement accessible, réalisable, vivable. En constituant de petits noyaux de volontaires risqués, des graines de moutarde microscopiques et quasi invisibles au commencement ... « Le règne de Dieu ne vient pas de façon à frapper les regards… le règne de Dieu est parmi vous... » (Luc 17. 20-21).

On remarque de façon évidente combien « l'évangile du kérygme » d'un Jésus Messie, Fils de Dieu, Kurios (empereur céleste) diffère et même s'oppose radicalement à l'évangile de Jésus. Mais c'est le faux évangile du Christ divin qui nous a été imposé depuis deux mille ans. Car c'est lui qui a triomphé dans la rédaction du Nouveau Testament et sa promotion parfois en « Paroles de dieu »

Pierre a-t-il été séduit par la «rumeur de Jérusalem» et le kérygme des hellénistes ?

Les récits accordent à Pierre un rôle considérable, même si les plus tardifs le mettent en concurrence avec « le disciple bien-aimé » ( Jean ?). Il semble avoir été le premier à se laisser convaincre de la résurrection de Jésus, et donc du kérygme de nos fameux Hellénistes ; il a dû jouer un rôle dans l'accueil paradoxal dans l'Eglise de Jérusalem de cette dissidence des synagogues nationalistes et intégristes, notamment de la synagogue dite des Affranchis.

Les exégètes sont convaincus que « les discours de Pierre ». qu’on lui attribue au début des Actes des Apôtres ne sont pas de lui, mais de l'auteur des Actes. Ce sont de parfaits exposés hellénistes, très savants en interprétations christologiques de l’Ancien Testament, peu plausibles dans la bouche d'un ignorant. « Ils constataient l'assurance de Pierre et de Jean et, se rendant compte qu'il s'agissait d'hommes sans instruction et de gens quelconques, ils en étaient étonnés » (Act.4.13).

Quoi qu'il en soit, le kérygme était proposé et enthousiasmait. Le message si différent de celui de Jésus et même opposé, le «christianisme» utilisant à tort le nom de Jésus, était en marche. L'affaire était bien partie. Pauvre Jésus !

Roger Parmentier

Published by Libre pensée chrétienne